L'HUMANITÉ - 31 OCTOBRE 1995 -
Une certaine forme d’exclusion
Michel Kawnick de l’Association française
d’information funéraire
La mort est-elle un sujet tabou ?.
Elle l’est devenue. Le public a modifié son
comportement face à la mort pour des raisons liées aux mentalités, à la
religion, à l’éclatement de la cellule familiale mais aussi au coût élevé
des obsèques. En fait, on s’attache plus aujourd’hui à cultiver le souvenir
des morts qu’aux rites funéraires eux-mêmes. C’est la société qui a changé.
Lorsqu’une personne âgée tombe malade, elle est d’autant plus exclue de la
société qu’elle entre dans le circuit souvent inhumain des hôpitaux. On
parle de longue maladie pour éviter d’évoquer la mort. Cela dérange. Et on
est entré dans une période où la maladie voire la retraite sont
malheureusement considérées comme un coût, un poids pour la société.
Cela vous révolte ?
D’une certaine manière oui. Car je crois
aussi que les scandales à répétition et les magouilles des entreprises
funéraires ont contribué à rendre taboue la mort. Enfin, les catafalques
devant les portes ont disparu. On ne porte plus le deuil devant ses voisins.
Les corbillards sont totalement banalisés, certains ressemblent même à des
véhicules de livraison de chez Fauchon...
...Pour Michel Kawnick, << la famille ne dispose d'aucun libre choix. C'est
en particulier vrai pour les chambres funéraires ou funérarium qui
fonctionnent comme un véritable système de captation de clientèle.
Aujourd'hui, les morgues d'hôpitaux tendent à disparaître au profit des
chambres funéraires. Les familles ne savent pas que l'infirmier ou le
morguier de l'établissement les dirige vers une société privée qui
amènera le corps
- un plus à payer - vers un funérarium, où les parents pourront veiller le
mort, mais en s'acquittant de 1.500 francs, 2.000 francs, voire 3.000
francs. Elles ne savent pas que l'hôpital a passé une convention avec une
entreprise funéraire privée parce que l'établissement ne peut pas héberger
le corps >>...
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