LE FIGARO
28 octobre 2024 Par Julien Da Sois
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Assurance obsèques : comment faire les bons choix
et éviter
les pièges ? Complexité des offres, montant des cotisations, délais de carence... Si ces contrats sont de plus en plus souscrits, ils demeurent peu lisibles pour le commun des mortels. Le Figaro vous donne les clés pour y voir plus clair. Bien qu’ils fassent régulièrement l’objet de critiques et de rappels à l’ordre par les organismes de surveillance du secteur, les contrats d’assurance obsèques gardent une certaine popularité. Qui va même croissante, d’après une récente étude de la société C-Ways pour la Fédération nationale du funéraire (FNF). Plus de deux répondants sur dix (21%) disent avoir souscrit à un contrat de ce type pour eux-mêmes, soit une hausse de 5 points en deux ans, tandis que 28% envisagent de le faire. Et 40% des défunts pour lesquels les personnes sondées ont organisé des obsèques possédaient un contrat obsèques (+ 4 points par rapport à 2022). Les données de France Assureurs confirment cette dynamique : fin 2023, le nombre de contrats obsèques s’élevait à 5,4 millions, en hausse de 3,4% en un an. «Environ 190.000 décès par an sont couverts par ces contrats, soit environ 30% des décès survenant en France», souligne le Comité consultatif du secteur financier (CCSF). Mais entre les différentes offres, les prestations proposées, les cotisations, les délais de carence, il peut être difficile d’y voir clair. D’autant que les organismes qui fournissent ces contrats (banques, assureurs, sociétés de pompes funèbres) n’aident pas à leur compréhension. Dans un récent avis, le CCSF dit avoir «constaté le manque de lisibilité globale des informations précontractuelles fournies aux souscripteurs», que les vendeurs d’assurances obsèques se sont, en réponse, engagés à améliorer. Le Figaro vous donne tous les conseils pour faire le choix le plus éclairé possible. Ne pas confondre assurance obsèques et assurance décès Tout d’abord, il importe de savoir ce qu’un contrat d’assurance obsèques couvre. Et de ne pas le confondre avec son cousin de l’assurance décès. Ce dernier «vise à garantir un capital à vos proches lors de votre décès, explique Samuel Bansard, directeur des activités de comparaison d'assurances chez Meilleurtaux. Par exemplepour financer le maintien du niveau de vie de sa famille, ou pour les études de ses enfants...» Quand le contrat obsèques a, lui, pour objectif de provisionner un capital destiné exclusivement au paiement de ses funérailles. Le bénéficiaire du contrat est tenu d’utiliser cet argent à cette fin. En capital ou en prestations ? Il existe deux grands types d’assurances obsèques : les contrats en capital - les plus courants - et ceux en prestations. Les premiers prévoient uniquement le versement d'une somme, dont le montant est déterminé à la souscription du contrat, à un bénéficiaire désigné, qui l'utilise pour financer les obsèques. «Mais il n'y a nulle garantie que la somme soit suffisante pour régler la totalité du coût des obsèques», souligne Michel Kawnik, président et fondateur de l'Association française d'information funéraire (Afif). D’autant qu’ «il y a très peu de revalorisations annuelles du capital», pointe-t-il. Les contrats en prestations prévoient eux à la fois le financement des obsèques et leur organisation. Ils sont donc assortis d’un devis de prestations funéraires, décrivant précisément les produits et services désirés par l’assuré au moment de ses obsèques (matériau et couleur du cercueil, transport du corps, déroulement de la cérémonie, etc.). «Si vous voulez prendre soin de tout arranger avant votre décès, ces contrats en prestations sont beaucoup plus intéressants que de simplement prévoir un capital, juge Michel Kawnik. D’autantque quelle que soit la date du décès, les obsèquesseront réalisées telle que décrites, sans aucun surcoût demandé à qui que ce soit.» Même s’il prévient : «Ces contrats sont beaucoup plus chers et sont proposés par moins de distributeurs.» Attention aux cotisations Les assurances obsèques reposent sur un système de cotisations, payables soit en une fois, à la souscription du contrat - mais c’est rare -, soit par mensualités, sur une durée définie à l’avance (de 5 à 20 ans) ou bien jusqu’à la fin de sa vie. Dans ce dernier cas, on parle de cotisations «viagères». Mais attention, ces cotisations - dont le montant dépend du capital choisi, de l’âge de souscription et du type de contrat - ne viennent pas gonfler le capital prévu lors de son décès. «Trop souvent, l'assuré cotise à perte : son bénéficiaire reçoit moins que l'argent versé», souligne 60 Millions de consommateurs dans une enquête parue en avril dernier. Une étude réalisée par le magazine sur 11 contrats montre ainsi que, «pour que la personne désignée pour organiser ses obsèques dispose d'une somme de 5000 euros, une assurée de 62 ans versera en moyenne 6490 euros si elle cotise sur dix ans et 6992 euros sur quinze ans». «Le mode de cotisation est un vrai point d’attention. Il faut choisir celui qui correspond le mieux à votre besoin, le plus adapté à votre situation, votre âge, etc.», conseille Samuel Bansard. Toutefois, le magazine 60 Millions de consommateurs recommande d’ «éviter absolument» les cotisations viagères, pour lesquelles «le surcoût peut potentiellement être encore plus lourd». En outre, le montant du capital choisi doit être calibré en fonction du coût prévisionnel de ses obsèques. Dans une étude de 2019, l'UFC-Que choisir avait estimé le prix moyen d'une inhumation – hors caveau et concession – à 3815 euros, et celui d'une crémation à 3986 euros. Mais il faut savoir que le coût des funérailles varie énormément d’une région à une autre, voire d’un département ou d’une ville à un autre. Éviter les prestations superflues Si votre choix se tourne vers le contrat obsèques en prestations, il faut prendre garde au détail des prestations funéraires fournies, qu'elles soient standardisées ou personnalisées. «Il ne faut pas accepter que soient inclus un transfert et un séjour en chambre funéraire privée, car c’est très cher et ce n’est pas obligatoire», avertit Michel Kawnik. Idem pour les soins de présentation et de conservation du corps, aussi appelés actes de thanatopraxie, conseille cet expert reconnu du monde funéraire. Enfin, même chose pour «les adhésions ou cotisations à des associations subordonnées à la société funéraire ou d'assurance». «Tout cela peut vous permettre d’économiser 1000 à 1500 euros», selon le président de l’Afif. Frais, délais de carence, exclusions de garantie... Attention aux petites lignes du contrat Avant de signer son contrat, il est indispensable de bien regarder en détail toutes les clauses. Parmi elles, «il est important de regarder les frais» appliqués à ces assurances, note Samuel Bansard, de Meilleurtaux. Que ce soit les frais d’entrée, les frais de dossier, les frais de gestion, les frais vers les versements, ou encore les frais de sortie ou de rachat. Prenez garde également au délai de carence prévu dans le contrat. Dans ce laps de temps, qui peut aller de un à trois ans, si l’assuré décède d’une maladie, le contrat ne s’applique pas. «Seul sera effectué le remboursement des cotisations versées jusqu'à la date du décès», précise le site de l’Afif, qui conseille de «privilégier le délai de carence le plus court». Un autre point de vigilance concerne les exclusions de garantie. «Des situations peuvent ne pas être couvertes, comme un décès après une prise de drogue, des suites d’une maladie connue ou par suicide, ou encore par exemple en pilotant un avion», relève Samuel Bansard. Comparer les offres «Quel que soit le type de contrat obsèques souscrit, il faut mettre en concurrence les distributeurs de ces produits», que ce soit des banques, des assureurs ou des sociétés de pompes funèbres, conseille Michel Kawnik. En effet, «les prix varient énormément d’une entreprise à une autre», souligne le président de l’Afif. Un travailfastidieux, certes, mais qui pourrait bientôt être facilité. Les professionnels se sont en effet engagés à mettre en place des «tableaux d'exemples sur les sites internet des organismes, afin de permettre une meilleure compréhension du fonctionnement des contrats d'assurance obsèques et le cas échéant faciliter une comparabilité des offres», peut-on lire dans l’avis du CCSF rendu public le 15 octobre dernier. Une assurance obsèques, vraiment indispensable ? Oui, souscrire une assurance obsèques peut permettre de soulager ses proches du paiement de ses funérailles, ainsi que de leur organisation, qui peuvent s’avérer pénibles en plein deuil. C’est d’ailleurs les premières motivations des assurés, selon l’étude de C-Ways pour la FNF (citées par respectivement 71% et 56% des sondés). Toutefois, c’est loin d’être obligatoire. «Ces assurances ont des avantages, mais aussi beaucoup d’inconvénients», reconnaît Michel Kawnik. «Elles favorisent les banques ou les assureurs, car il y a des cotisations à payer», constate Pascale Barlet, rédactrice en chef du magazine Que Choisir Pratique, qui juge préférable de dédier un contrat d'assurance-vie au financement de ses obsèques, ou de se constituer un petit capital de côté en vue de son décès. «Il faut à peine huit ans de versements mensuels de 40 euros sur un livret A pour constituer un capital de 4000 euros, intérêts compris», soulignait 60 Millions de consommateurs dans un article de 2023. Et c’est sans compter sur une autre règle : après un décès, un peu plus de 5800 euros peuvent être prélevés sur le compte bancaire du défunt pour payer ses obsèques. |
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