LE PARISIEN

Val-de-Marne matin

14 août 2006

 

L'enterrement tourne au cauchemar

 
Thiais

    COMMENT FAIRE le deuil de sa mère lorsque l'enterrement a tourné à la farce cruelle et indigne ? Les quatre enfants de Gisèle P., décédée à l'âge de 61 ans, vont devoir composer entre la douleur et la colère qui les animent aujourd'hui contre l'entreprise funéraire Barbier, chargée de l'inhumation organisée au cimetière municipal de Thiais.
    Le député-maire, Richard Dell'Agnila (UMP), est même intervenu afin que ses collaborateurs appuient aujourd'hui, auprès du commissaire de la commune, la plainte de la famille déposée samedi contre la société. L'élu parle, en effet, d'un comportement «extrêmement choquant». Et pour cause...

  

Un trou trop petit pour le cercueil

    Retour sur les faits. Jeudi, vers 15 h 30, le cortège composé d'une trentaine de personnes vient rendre un dernier hommage à Gisèle, habitante de Thiais depuis une quarantaine d'années. Lors de la dépose du cercueil, c'est la stupéfaction. Le trou creusé par les employés de l'entreprise Barbier est trop petit. Impossible de poser le cercueil à l'horizontale. Qu'importe, «les fossoyeurs ont tenté de le faire entrer de biais, à l'aide de grand coups de pied en l'abîmant au passage», raconte Patrice, fils de la défunte.
    En vain. L'assemblée commence sérieusement à être mal à l'aise. On essaie donc de l'enterrer à la verticale. Cette fois, c'en est trop pour la famille qui demande à ce que l'on creuse à nouveau. Réponse de l'ouvrier à la sœur de la défunte : «Si vous n'êtes pas contente, vous n'avez qu'à prendre la pelle ! Moi, je suis aux 35 heures. Je n'ai pas que ça à faire ! »

Police et mairie interviennent sur les lieux

    «Il était odieux, c'était un vrai cauchemar, raconte Claudine, sœur de Patrice. En plus, un tas de terre et des outils nous empêchaient de nous recueillir convenablement devant la tombe de ma mère. La famille est d'abord passée puis, lorsque ce fut le tour des amis, l'ouvrier a commencé à recouvrir le cercueil de terre. La cérémonie n'était pas même pas terminée !»
    Fou de rage, Patrice téléphone à la police qui intervient sur les lieux, ainsi que des élus de la mairie. Des proches joignent également le responsable de la société Barbier, basée à Thiais, qui n'a pas jugé utile de se déplacer. Les gens sont ainsi restés sur place, prostrés et outré, jusqu'à 19 heures.
    Contacté à plusieurs reprises, le responsable de l'entreprise Barbier n'était pas disponible non plus pour répondre à nos questions. Qu'en est-il aujourd'hui ? «Ma mère est enterrée debout, comme un vulgaire sac à patates. Pour cela, ils ont poussé le cercueil au maximum. C'est horrible et inhumain. Je n'en dors plus la nuit tempête Patrice, au bord des larmes. Après toutes les souffrances qu'elle a endurée, liées à la maladie, cet enterrement, c'est comme si elle était morte une deuxième fois.»
CHRISTINE MATEUS


  

 

 

THIAIS, CIMETIERE MUNICIPAL, JEUDI. Le trou prévu pour la dépose du cercueil de Gisèle P. étant trop petit, les fossoyeurs l'ont enterrée à la verticale. (DR.)
   

«Il faut toujours porter plainte.»
MICHEL KAWNIK, président de l'Association française d'information funéraire

LE PRESIDENT-FONDATEUR de l'Afif (Association française d'information funéraire), Michel Kawnik, n'a pas de mots assez durs pour qualifier l'attitude de la société Barbier dans cette affaire.
«Il faut lutter contre cette loi du silence dont profitent ces entreprises qui manquent d'éthique. Il faut toujours porter plainte auprès du commissariat ou du procureur de la République. De telles atrocités ont des répercussions psychologiques importantes auprès des proches»
Que faire, donc ? «L'entreprise a une obligation de résultat. Dans les honoraires payés par les familles, les déplacements sont compris, notamment pour que la vérification des mesures soit faite avant l'inhumation. Toutefois, l'erreur est humaine. En cas de problème, tous les cimetières ont un caveau provisoire et l'entreprise doit faire le nécessaire à ses frais.»
Autres conseils : la famille doit adresser un courrier au service des pompes funèbres de la préfecture et expliquer sa mésaventure.
«L'habilitation des entreprises est délivrée par le préfet, il peut aussi très bien la retirer...» A ce jour, l'entreprise Barbier a proposé à la famille P. un dédommagement de 412 € sur les 3 200 € qu'elle a dû débourser. «C'est tout simplement inacceptable», conclut, écœuré, Michel Kawnik.
C. M.

Afif (association loi 1901), 9, rue Chomel, 75007 Paris. Tél. 01.45.44.90.03

 

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